et deux oreilles à
l’intérieur rose ; 2- « Ensuite, les yeux, le nez, la bouche… » ; en regard :
la tête complète de Binou ; 3- « le cou le bras et le bedon… » ; en regard :
le corps de Binou de la tête au bassin ; 4- « les jambes et les pieds… » ; en
regard : Binou au complet qui agite le pied (notons la description humanisée,
« jambes » et non « pattes », le chaton étant une hypostase de l’être humain) ;
5- « le dos et la queue » ; en regard : Binou couché sur le ventre, qui agite
et regarde son appendice caudal (soulignons le détail physiologique final qui
montre la différence et la spécificité animales et relativise l’identification de
l’enfant-lecteur au personnage-héros) ; 6- « Coucou, Binou!!! » ; en regard : Binou
souriant, au grand complet, gambade comme un bambin prêt à affronter ses
aventures ou la vie (Jolin, B1, n. p.). À l’instar de Roger Paré (Paré, 1997),
Dominique Jolin montre une salutaire irrévérence dans le lexique (le ventre est
un bedon) et dans le cumul des images qui aboutissent à « et la queue »,
douce moquerie respectueuse cependant de la fantaisie de l’enfant colecteur. Par
ailleurs, d’album en album, Dominique Jolin construit/déconstruit le processus
d’apprentissage. Par exemple, les deux albums en plastique pour le mini-lecteur au
bain, vont pousser au paroxysme soit l’irrespect lexical, soit les ressources de
la mise en page. Pour le premier cas, le
Ça flotte Binou? frôle la subversion
enfantine. L’ouvrage nous initie au bain et aux lois de base de la physique
expérimentale pour les 6 mois et moins : « Dans le bain de Binou…le canard flotte – le
savon flotte – les bottes flottent – la brosse à dents flotte – et…même le caca
flotte » (Jolin, A2, n. p.). Procédé fréquent pour les bébés-livres, le point
culminant de l’énumération s’appuie sur un effet de surprise à la dernière page ;
mais cette fois-ci, c’est comme si l’enfant avait subverti l’apprentissage en lui
imposant une de ces finesses qui réussissent à exaspérer les adultes. Pour le second
cas, l’album
À l’eau Binou va donner une tout autre dimension à la surprise
finale
. Le volume nous montre les bienfaits du bain en multipliant les lieux de
baignade : « Binou se baigne dans un seau – dans un bocal – dans une tasse – dans
un sac – dans le noir – et…même dans ton bain! » (Jolin, A1, n. p.). Or, la
dernière vignette reprend telle quelle la page couverture dans une mise en abyme
parfaite. Autotextualité et autoréférentialité (van Gorp, Delabatista, D’hulst,
Ghesquiere, Grutman et Legros, 2005, p. 256, 408–409 et 474–475), certes, mais aussi
subtil recours à une technique d’identification à visée pédagogique. Tout en
confortant l’idée que c’est dans un bain que l’on prend son bain et non dans
un seau, un bocal, un tasse ou un sac, l’image actualise la perception de la
lecture assistée. Le livre finit bien dans le bon contexte – une baignoire de
bébé – mais pas dans n’importe laquelle, celle du lecteur (
ton bain) qui le
tient dans ses mains. Binou est avec le lecteur ; et le personnage-support de
l’apprentissage rejoint l’apprenant en son milieu concret à l’instant présent de la
lecture.
Dominique Jolin aime bien jouer de cette identification lecteur/enfant – enfant/animal
– héros qui s’inscrit dans la conception même de l’album. Par exemple, dans
Binou en couleurs, Binou se départit d’abord des trois couleurs de base, le jaune
le bleu et le rouge, incarnées sous forme de micro-chatons bien vivants, pour
être seul, chaton blanc perdu dans une double page jaune (« Voilà Binou tout
seul… »). Suit une double page blanche, de la blancheur de Binou, avec en rouge
l’angoissante interrogation « Plus de Binou? ». Heureusement, la suite coupera
court à cette inquiétude : « Noooon! C’était une blague! Binou a trois amis :
Rouge,