et tantôt
repère générateur d’une angoisse qui se traduit par des comportements agressifs de la
part du fils, l’idéalisation du père maintient notre jeune héros dans une forme de
dépendance affective qui aboutit à un manque d’empathie à l’égard de sa mère et à une
peur presque maladive de l’abandon. Face à ce repère idéalisé, notre jeune héros adopte
des comportements qui constituent autant de symptômes de l’immaturité du
préadolescent (Klock, 1974, p. 40).
Le père prolongé
Voyons maintenant le père prolongé, ce second père « compensé » que Gauthier placera
sur la route de son jeune héros pour l’aider à dépasser la phase d’égocentrisme dans
laquelle le maintient le père idéalisé.
Tout au long des quatre premiers romans, Carl établit une relation d’amour fusionnel
avec sa chienne Babouche. Elle lui rappelle son père, car c’est lui qui la lui a offerte en
cadeau quand il avait trois mois ; âgée de neuf ans comme lui, elle s’avère être sa seule
confidente. Objet transitionnel, elle constituera un double repère : le prolongement du
père et aussi son alter ego. En d’autres termes, la symbiose étroite entre le
père prolongé et le double de Carl. En tant que prolongement du père, elle
sera le repère qui apaise, qui angoisse et qui disparaît. Puis, simultanément
à cette évolution, elle deviendra la confidente qui réconforte, qui vieillit et
qui meurt. Par cette mort, le héros se trouvera libéré de cette symbiose faite
d’angoisse, de deuil et d’égocentrisme, et s’ouvrira vers une saine altérité. Voici
un tableau qui montre quel double rôle Babouche a joué dans l’évolution du
héros.
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| Rôle du
repère | Nature du
repère | Illustrations |
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| Repère qui
apaise | L’intermédiaire,
l’amie
chaleureuse | Le père donne à son fils un objet transitionnel : « Papa
qui met dans mon berceau une toute petite boule de poil
noire… La douce, douce chaleur de Babouche. Papa me
laissait une amie. » B3–57 |
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| Repère qui
inquiète | L’intermédiaire
vieillissant et
mourant | Carl, malgré quelques périodes de déni, qui se traduisent
par des boutades, peut formuler un lucide diagnostic
qui montre qu’il n’est pas dupe du vieillissement de sa
chienne : « C’est tout juste si elle m’entend quand je lui
siffle de toutes mes forces dans les oreilles. Quand je lui
lance des biscuits, elle passe à côté neuf fois sur dix. Objets
volants non identifiés! » B1–40 |
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| Repère qui
disparaît | L’intermédiaire
meurt : choc
du vide | La mort de Babouche atterre Carl. Du déni au désespoir
en passant par l’agressivité, il est forcé de se rendre
à l’évidence après ce dialogue avec sa mère : « Le
vétérinaire t’a expliqué, Carl. C’est le cœur de Babouche
qui a lâché » ; et Carl de répliquer : « Ce n’est pas le
cœur de ma chienne qui a lâché, c’est ton ignorant de
vétérinaire qui l’a empoisonnée. » B4–8
Une fois la réaction de colère passée, c’est le constat et la
dépression : « Depuis que ma Babouche est morte, plus
rien ne m’intéresse dans la vie. Rien. » B4–13 |
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Tabelle 3.0: | Tableau 3 : Père prolongé (à travers la chienne Babouche, alter ego
de Carl) |
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