chevelure brune bouclée, ses gestes gracieux. », pour faire contraste avec le terrible
châtiment qui l’attend et portera atteinte à sa beauté physique.
En ce qui concerne le goût immodéré de Rose pour les divertissements, Gagnon et
Soulières mettent en oeuvre le même procédé d’amplification : dans le beau danseur
(CG), Rose se met à « tourmenter son père » ; en lui suggérant d’inviter « le
violoneux du rang voisin », le violon annonçant déjà une danse « diabolique ». Dans le
baiser maléfique, on trouve aussi le dialogue, mais avec une duplication, probablement
pour illustrer la duplicité de Rose. À moins que ce ne soit sa compétence argumentative
quand, fine mouche, elle n’hésite pas à suggérer d’inviter l’oncle et la tante que le père
ne voit pas souvent. Une forme de harcèlement parental, somme toute plutôt
moderne!
Rose est insolente à l’égard des Aînés dans la version de PADG : « Allons,
tantante…roulez votre chapelet, et laissez les gens du monde s’amuser! » Cet irrespect
trouve un écho chez le diable qui lui demande : « Que vous a dit cette vieille
radoteuse? » (p. 32) Toutefois, ces traces de conflit intergénérationnel sont absentes
dans les deux versions contemporaines. Il serait intéressant de savoir pourquoi
(démission des parents?).
Rose est fiancée, mais cela n’empêche rien! Si, chez PADG, elle aime Gabriel
« comme la prunelle de ses yeux » (p. 30), chez Gagnon, ses sentiments sont plutôt
tièdes : elle préfère se divertir (p. 110). Soulières, pour sa part, se borne à dire
qu’elle a 16 ans, qu’elle est fiancée et que le mariage est prévu pour Pâques
(p. 3).
Cependant, son comportement avec les hommes témoigne de sa nature frivole. Même
si, ce soir-là, avant l’arrivée de l’étranger, elle n’avait pas quitté Gabriel, son fiancé, un
commentaire du narrateur de PADG laisse planer des doutes sévères sur sa vertu :
« Elle était un peu scabreuse, pour ne pas dire éventée » (p. 30). Par opposition
à cette « apparence de fidélité », les deux versions de Soulières et Gagnon
nous la montrent en train de danser « beaucoup avec les autres jeunes gens »
(p. 8). Si elle hésite, chez PADG, à délaisser son amoureux, ce soir-là, pour les
bras de l’élégant inconnu (p. 31), dans les deux versions modernes, elle semble
n’éprouver aucun scrupule, et même, elle l’oublie carrément (p. 16, R.S. et p. 114,
C.G.).
Méfiance et naïveté la caractérisent dans PADG seulement : elle résiste aux avances
du diable, consciente des différences sociales : « Finissez donc, monsieur, ce n’est pas
bien de vous moquer d’une pauvre fille d’habitant comme moi » (p. 32). Comme le
diable persiste à vouloir déclarer son attachement, elle lui dit « je vous crois »
(p. 33).
Le diable, de son côté, est porteur de six traits distinctifs, au moins.
Les traits physiques distinctifs du diable obéissent aux mêmes stéréotypes dans les
trois versions. Beau et élégant, vêtu de velours noir, descendu d’un beau cheval noir,
on le montre réticent à se départir de ses gants (à cause de ses griffes?) et
de son chapeau (à cause de ses cornes?)…Ses yeux ; (miroirs de l’âme?) ont
« quelque chose de sournois » (PADG, p. 31). Effectivement, hypocrisie et ruse le
caractérisent : dans PADG, le diable fait semblant d’être jaloux de Gabriel (p. 33) et
proteste de sa sincérité : « Quoi! Vous me croiriez capable de vous tromper! »
(p. 33).