le roman par une
pratique picturale erratique et étrange : elle se promène d’une pièce à l’autre du nouvel
appartement et, outil de l’artiste à la main, recouvre de couleur or tous les
objets.
Et elle continue son chemin, son pinceau dans l’autre main, les yeux vagues. De l’or liquide dégouline sur le plancher. (Gingras, 2003, p. 17) C’est la découverte du piano qui permettra la reconfiguration identitaire de la mère et complétera la construction de l’espace romanesque. Ainsi, dès lors que sa fille Clara aura identifié le lieu où se trouve l’instrument de musique, elle acceptera de sortir de la maison et de se rendre chez les religieuses. Retrouvant sa voix, elle tissera, enfin, de nouveaux liens avec la vie. […] maman donnera un récital intime. Son premier récital depuis 20 ans. Ah! voilà maman. Elle a revêtu le chemisier aux fils d’or qu’elle mettait autrefois lorsqu’elle jouait et chantait sur scène. Elle flamboie comme un soleil. (Gingras, 2003, p. 62) Au terme de l’histoire, « fondu » dans l’athanor que constitue le parcours de Clara, et déposé dans le creuset du piano, l’or du vêtement actualise la fin de la quête. La transmutation de la mère accomplie, le roman se termine, scellant définitivement la configuration spatiale de l’œuvre dont la littérarité et le caractère philosophique s’avèrent, du même coup, clairement et littéralement « mis en lumière ».
* Dans La boîte à bonheur comme dans toutes les œuvres de qualité pour la jeunesse, l’espace n’est ni un bloc monolithique, ni une simple toile de fond pour l’histoire. Il en va certes de même en littérature générale. Cela dit, envisager l’espace romanesque depuis la perspective sui generis du modèle IAL permet de démontrer combien la construction de l’espace dans les œuvres littéraires destinées à un jeune public est modulée par le caractère intrinsèquement intentionnel des œuvres et, en cela, combien elle participe d’une poétique et d’une esthétique propres. Bâti en couches superposées, l’espace romanesque en littérature pour la jeunesse est un construit singulier. L’établissement d’une strate fondamentale – espace générique – composée de lieux propres à l’enfance3
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