originaux, de circuler
beaucoup à vélo, et de ne pas habiter dans une grande ville. En effet, Daniel vit à
Sainte-Cécile de Masham, près du Parc de la Gatineau, avec son père et sa mère, et
Gaël dans une zone rurale indéterminée, également avec ses deux parents, mais aussi
avec un frère aîné exaspérant.
Globalement, le caractère de ces deux adolescents ne diffère pas de certains
stéréotypes liés à l’adolescence : tous deux ont horreur d’attirer l’attention ! Daniel est
renfermé, mal à l’aise dans les silences, et, selon son professeur, il gaspille son potentiel
en faisant le minimum à l’école. De son côté, Gaël est fougueux, plus ou moins volubile
et surtout, très sensible, ce qui le mène souvent au bord des larmes ; enfin, par rapport
à l’école, il est tout sauf nonchalant.
En ce qui concerne les loisirs, Daniel aime les films d’aventure, les jeux vidéo, le
base-ball, mais Gaël incarne plutôt le type intellectuel, jouant au jeu des « Cadavres
exquis » avec Mylène, son amie d’enfance. Autre originalité, le jeune homme nourrit de
façon régulière ses poules et ses lapins dans leurs cages. En outre, il se passionne pour
les livres qui traitent des moeurs sexuelles des animaux, notamment les hippocampes,
dont le mâle a pour particularité de porter dans son ventre les oeufs, qui assureront sa
postérité.
Adolescents en crise
Deux romans, deux adolescents, deux milieux, deux familles, deux crises. Chez Daniel,
quatre raisons expliquent la crise existentielle qu’il traverse : l’empoisonnement de sa
chienne Musette, la trahison de la belle Pascale qui l’a laissé pour Robert Melançon avec
qui « la première fois » a eu lieu et, en plus, cette remarque d’un professeur : « Quand
on est intelligent, on n’est pas un élève médiocre ». Enfin, comble de malchance, il n’a
pas obtenu l’emploi d’été qu’il convoitait et qui consistait à faire du reboisement.
Pourquoi vivre? se demande-t-il. Et le voilà qui prépare son suicide. Selon Risacher et
Lasbats (1992, p. 37), ce geste fatal résulte d’« une relation tumultueuse que le jeune
entretient avec lui-même, avec son corps en pleine mutation, avec le monde
extérieur…On peut considérer le suicide comme un acte de communication, ultime,
désespéré… ».
Quant à Gaël, il vient d’apprendre que Mylène, son amie d’enfance (qui n’est pas sa
blonde) l’abandonne pour le beau Lambert et le cinéma, au lieu de jouer aux
« Cadavres exquis » avec lui…Sans parler de Julien, son frère aîné qui l’espionne, le
harcèle, dénonce ses moindres gestes aux parents…
Ainsi, dans les deux cas à l’étude, « la crise est crise du sujet, tiraillé entre ce qu’il
croit être et ce qui parle en lui, entre ce qu’il veut et ce qu’il peut, ce qu’il cherche et ce
qu’il réalise » (Clerget, 1987, p. 56).
Modalités du savoir, du vouloir et du pouvoir
Retrouver Jade est le récit du sauvetage « fortuit » de Daniel, qui se retrouve presque
immédiatement investi d’une mission qu’il accepte (p. 46) : c’est le « vouloir ». Cette
mission, au sens proppien du terme, consiste à aider Boris le baroudeur, de
retour d’Afrique, et qui vient de lui sauver la vie, à retrouver la fille de son
amie Dewi qui semble avoir fait une fugue. Le « pouvoir » que l’adolescent va
acquérir, ce