- 11 -Gervais, Flore; Noël-Gaudreault, Monique: Littérature de jeunesse et espaces identitaires 
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forme ensemble » (Reichler, 1990, p. 125). Ajoutons, enfin, à ce répertoire, la conception de Jean-Philippe Miraux : « En fait, la géographie de l’espace romanesque correspond à ce que l’on pourrait appeler la géographie du personnage » (Miraux, 1997, p. 17).

Ce n’est donc pas l’espace tel qu’en lui-même et dans l’absolu que permet d’appréhender l’œuvre romanesque, mais une concaténation signifiante et toujours en mouvement – espace/temps/personnage – résultant de la perception du sujet, lui-même construit par sa présence in situ. On peut en déduire que l’expropriation du lieu est le corollaire d’une appropriation – pour ne pas dire d’une « assimilation » – de l’espace par le sujet. L’espace romanesque n’apparaît plus, dès lors, comme un bloc monolithique. Sa construction relève plutôt d’une prise en charge par un sujet ontologiquement constitué – en littérature pour la jeunesse, les objets et les êtres anthropomorphes bénéficient fréquemment de ce statut – dont l’identité est redevable à une position singulière dans l’espace et à la perception à laquelle donne lieu ce positionnement.

À la lumière de ces divers éclairages, l’étude des fonctions identitaires de l’espace apparaît donc d’autant plus pertinente en littérature pour la jeunesse que cette dernière favorise un arrimage serré et relativement transparent entre système de personnages et système spatial. À ce titre, le thème du présent ouvrage portant sur les « espaces identitaires » en littérature pour la jeunesse pose d’emblée un lien entre espace et identité tout en sous-entendant, par ailleurs, qu’il puisse exister d’autres qualifications possibles de l’espace. En dépit de ces possibles, je m’en tiendrai ici à un postulat unique, celui du caractère fondateur de l’identité dans la création de tout espace en littérature pour la jeunesse. Car voilà une littérature qui, du fait de sa destination – et donc de son intentionnalité –, tend à privilégier l’identité (par le miroir du « même ») à son pôle contraire l’altérité, les deux, toutefois, ne pouvant exister l’une sans l’autre. Dans cette perspective, je soutiens que l’étiologie identitaire de l’espace en littérature pour la jeunesse repose d’abord sur l’intentionnalité constitutive (I) de ses oeuvres. Ce dernier concept, fondateur de ma réflexion théorique sur la littérature pour la jeunesse, n’est cependant pas suffisant pour décrire l’œuvre littéraire destinée à un jeune public. Il est indissociablement lié aux concepts d’accessibilité (A) et de littérarité (L). C’est sur les bases de cet appareil théorique schématisé par le modèle IAL que j’étudierai ici le cas exemplaire que constitue La boîte à bonheur (2003) de Charlotte Gingras.

1. Prémisses

Dans les textes littéraires comme dans la vie, le rapport entre sujet et espace est médiatisé par une localisation. Dans le système de l’œuvre romanesque, le narrateur est le gardien de ce poste d’observation. C’est lui qui construit progressivement le « lieu topique », tel que le désigne Greimas, ce lieu « dont on parle et à l’intérieur duquel on parle » (Greimas, 1979, p. 14 ; je souligne). Si, en littérature pour la jeunesse, cette fonction de sentinelle peut être occupée par un narrateur omniscient et indéterminé, elle s’avère le plus souvent relever de la responsabilité d’un narrateur enfant, double étrange en quelque sorte, mais non inquiétant, d’un auteur implicite dont le statut d’adulte demeure presque toujours occulté au profit de la mise en


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