La désignation du héros par des procédés différentiels
chez Robert Soulières
Noëlle Sorin
Université du Québec à Trois-Rivières (Québec)
Noelle.Sorin@uqtr.ca
Résumé
Le héros définit le genre, dit-on. De prime abord, les deux romans de Robert
Soulières, Le visiteur du soir et Le cadavre de classe appartiennent au genre
policier, pourtant le héros n’est peut-être pas celui qu’on pense. Pour la
désignation du héros, nous nous inspirerons des procédés différentiels de
Hamon (1977). En effet, le héros recevrait une qualification plus étoffée
que celle des autres personnages, bénéficierait d’une distribution plus riche
puisqu’il participe aux moments cruciaux du récit. Il jouirait d’une plus
grande autonomie, c’est-à-dire qu’au cours du récit, il peut se présenter seul
ou en compagnie de n’importe quel autre personnage, et dispose même d’une
certaine mobilité. Le héros possèderait une fonctionnalité différentielle, ce
qui signifie qu’en plus des fonctions narratives classiques, s’ajouteraient des
fonctions relevant de la globalité du récit, ce que les autres personnages ne
partagent pas ou si peu. Le héros enfin serait désigné explicitement comme
héros par le narrateur, voire par l’énonciateur. Dans les deux romans de
Robert Soulières, nous verrons que le genre est non seulement malmené, mais
que la représentation du héros est loin d’être conventionnelle et stéréotypée.
Introduction
Dans le roman policier, le héros définit le genre, dit-on. De prime abord, les deux
romans de Robert Soulières, Le visiteur du soir paru en 1980 et Un cadavre de classe en
1997, sont des romans policiers au sens établi par Poslaniec et Houyel (2001,
p. 23) :
Le policier est un genre narratif centré sur un crime [méfait], au sens
juridique du terme, structuré en fonction de six éléments principaux (le
crime, la victime, l’enquête, le coupable, le mobile, le mode opératoire), de
telle sorte que la focalisation narrative se fasse sur l’un au moins des six
éléments.